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" L'écolabel : un outil de progression, de management et de communication "

Pour Élisabeth Fournier (à droite), coordinatrice nature et paysage à Bordeaux Métropole, et Marie Combrié, chef du centre de gestion de l'espace public du pôle territorial ouest de Bordeaux Métropole, l'écolabellisation a conforté des pratiques de gestion mises en place dès 2002.

Engagée depuis 2002 dans une gestion différenciée de ses espaces verts, la ville de Mérignac, en Gironde, a choisi l'écolabellisation pour valider ses nouvelles pratiques, les améliorer, mais aussi valoriser sa démarche auprès des agents et du public.

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En 2002, la ville de Mérignac s'est engagée dans une démarche de gestion différenciée de ses espaces verts et de gestion de la consommation en eau, tout en embauchant un nouvel agent. Ses pratiques ont évolué au fil des années vers une meilleure prise en compte de l'environnement. Mais les choix réalisés étaient-ils les bons ? Conscient de la nécessité d'évaluer la gestion menée, le service des espaces verts (SEV) s'est engagé dans une démarche de labellisation en 2008, afin de s'appuyer sur le référentiel, avec pour objectif supplémentaire un arrêt total d'utilisation des produits phytosanitaires dans les parcs. Dès 2009, sept parcs ont obtenu l'écocertification EVE® (Espace vert écologique). En 2012, la ville a changé de référentiel et huit parcs ont été labellisés Ecojardin. Et elle est passée au « zéro phyto » dans pratiquement tous ses espaces, avec une réduction des quantités utilisées dansles cimetières et sur les terrains de sport.

« Le changement de pratiques s'est déroulé progressivement », raconte Élisabeth Fournier, ex-directrice du domaine public de Mérignac, aujourd'hui coordinatrice nature et paysage à Bordeaux Métropole (*). En 2005, un bureau d'études a accompagné le service pour établir un plan de gestion différenciée, former les jardiniers et mettre en application les mesures du plan. Puis les agents ont pris l'habitude d'assister aux réunions organisées dans le cadre de cinq programmes transversaux établis par leurs chefs de service : « propreté », « embellissement », « arbres », « biodiversité », « espaces verts pour tous ». Élus et maire y participent à l'occasion de la rencontre annuelle d'évaluation et d'objectifs pour l'année suivante. Cette réunion est aussi l'occasion de valoriser le travail de chacun par la présentation, par les agents eux-mêmes, des travaux réalisés dans l'année. Sous l'impulsion du service voirie-propreté qui a souhaité passer au zéro phyto sur tous les trottoirs, l'ensemble du SEV, déjà engagé dans la démarche depuis 2006, parvenu en 2009 au zéro pesticide dans les parcs, a étendu la démarche à l'ensemble des espaces verts en 2012. « C'est dans ce cadre que s'est mis en place l'écolabel, comme un outil de progression, de management et de communication. »

« La démarche de labellisation permet d'évaluer nos pratiques sur la base d'un référentiel élaboré et partagé par les professionnels », poursuit Élisabeth Fournier. « L'intérêt est de savoir où on en est, sur quels points concentrer nos efforts, et d'entrer dans une démarche d'amélioration continue. Nous avons commencé avec l'écocertification EVE d'Ecocert, dont les tarifs à l'époque étaient élevés. Ce label privé, valable un an, impose un parcours de progression. Nous sommes passés à Ecojardin en 2012, le label créé par Plante et Cité et Natureparif, et des collectivités en partenariat avec notamment Hortis. Il est valable trois ans et coûte 650 € par parc. »

Le référentiel Ecojardin aborde huit thématiques : planification et intégration du site ; sol ; eau ; faune et flore ; équipements et matériaux ; matériels et engins ; formations ; public. Il comporte des critères rédhibitoires, obligatoires ou facultatifs. « L'audit se déroule sur deux jours. Des auditeurs externes visitent le site avec le personnel de terrain, et en évaluent la gestion sur la base d'une grille multicritère. Ils étudient l'engagement général en matière de développement durable, les documents et les démarches du service. Et ils vérifient la concordance entre documents et faits. »

« L'écolabellisation a nécessité de recueillir de nombreuses données et de réaliser des analyses (connaissance des sols, cartographie du réseau d'irrigation...) », résume Marie Combrié, ex-chef du service environnement de Mérignac, chef du centre de gestion de l'espace public du pôle territorial ouest de Bordeaux Métropole. « Puis nous avons mis en oeuvre les changements nécessaires. » Les huit parcs écolabellisés représentent 634 fichiers à fournir, une semaine de visite et le travail d'un agent pendant deux mois à temps plein.

Mérignac a choisi de se focaliser sur trois axes prioritaires : le sol, l'eau, la faune et la flore. Pour cette dernière thématique par exemple, les actions portent sur la connaissance de la flore indigène ou le suivi de la biodiversité. Les oiseaux nicheurs ont été choisis comme espèces indicatrices ; ils ont un « capital sympathie » qui facilite la valorisation de la démarche auprès du public. « Nous notons en 2014 un cortège plus intéressant et diversifié d'oiseaux dans les parcs 'moins entretenus', dans lesquels les bois morts ont été préservés et des nichoirs installés », remarque Magali Contrasty, en charge du suivi ornithologique dans le cadre du programme Refuge LPO.

Côté entretien, les gazons sont tondus plus haut, alors qu'ils étaient défeutrés, aérés, sablés. Le nombre de massifs fleuris a diminué de moitié. « Le passage à un fleurissement diversifié, coulées de bulbes, flore naturelle, arbres et arbustes fleuris, aires engravées et pieds d'arbres fleuris a permis d'économiser l'eau et les temps de travaux tout en répartissant mieux le fleurissement sur toute la ville », décrit Élisabeth Fournier. Le zéro phytosanitaire a entraîné des points noirs, comme la présence de chiendent dans les massifs, ou la gestion de la prêle. « Ensemble, confrontés à des problèmes de ce type, nous envisageons de revoir le site concerné : par exemple nous remplaçons un massif envahi de prêle par un gazon tondu. »

Le label valorise la démarche environnementale auprès des agents et du public. « La certification constitue un outil de management qui permet de motiver les équipes, de rassembler autour d'un même objectif, et de valoriser le personnel du site », souligne Élisabeth Fournier. Les agents ont suivi des formations sur les alternatives au désherbage par exemple. Ils ont également été impliqués dans le protocole Propage (PROtocole Papillons Gestionnaires), pour le suivi de la biodiversité.

En même temps qu'elle faisait évoluer ses pratiques, la ville s'est attachée à communiquer auprès de la population. Ainsi, l'arrêt du désherbage chimique s'est traduit par des pieds de murs et d'arbres fleuris, l'apparition d'herbes par endroits, de feuilles dans les parcs, de pelouses jaunissantes faute d'arrosage ou hautes (une seule fauche par an en sous-bois). Pour s'assurer de l'acceptation de ce nouveau paysage, Mérignac a choisi de communiquer « positivement » : distribution d'informations sur la flore ou la faune sauvages, expositions et journées portes ouvertes, visite guidée sur la flore sauvage et les herbes de trottoirs...

Un tout cohérent. Gestion différenciée, zéro phyto, labellisation écologique constituent des outils au service d'une stratégie globale en faveur du développement durable. Une stratégie qu'elle inscrit dans son Agenda 21, mis en place en 2003, mais aussi dans son PLU (Plan local d'urbanisme) et ses plans pluriannuels d'investissement et de financement (PPI et PPF), avec la rédaction d'une charte paysages et biodiversité en 2011. Mérignac s'engage ainsi dans la réalisation des trames vertes et bleues, la plantation d'arbres, la création de nouveaux squares et parcs... Ces actions entrent aussi dans sa démarche d'adaptation au changement climatique et de lutte contre les îlots de chaleur (mise en place d'un plan climat PCET - Plan climat énergie territorial - en 2012).

Valérie Vidril

(*) Depuis le 1er janvier 2015, la Métropole exerce de plein droit, en lieu et place des communes la compétence « actions de valorisation du patrimoine naturel et paysager » (loi MAPTAM).

Le Parc de Vivier fait partie des huit parcs mérignacais à être aujourd'hui labellisé Ecojardin.

Dès 2006, la ville de Mérignac a diminué progressivement les surfaces traitées au désherbant chimique dans ses parcs, pour atteindre le zéro phyto généralisé en 2012 (hors cimetières et terrains de sports).

Les nouvelles pratiques ont entraîné des modifications de paysage auxquelles il a fallu préparer les habitants. Le label offre en ce sens une base de communication.

Même si le nombre de massifs fleuris a diminué de moitié dans les parcs, ils sont maintenus à certains emplacements stratégiques, conformément au principe de la gestion différenciée.

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